L’avenir du littoral togolais s’écrira autour de l'écologie, du patrimoine et des communautés ou ne s’écrira pas

Marrons © Parmenas Awudza, Agbodrafo Novembre 2022
Marrons © Parmenas Awudza, Agbodrafo Novembre 2022

Alors que le phénomène d’érosion côtière s’est accentué au cours des trois dernières décennies, nous faisant perdre au moins 2 km de côtes, des routes nationales et bouleversant la vie sociale et économique de dizaines de communautés avec la disparition de leur cadre de vie ; il est désormais clair qu’il n’y aura pas d’avenir pour le littoral togolais, tel que nous le connaissons aujourd’hui, si nous échouons à relever les défis de préservation de la côte et de prospérité vertueuse des communautés riveraines.

En ce sens, il faut aujourd’hui enclencher de nouvelles initiatives d’intelligence collective, en plus de dynamiser celles existantes, entre les communautés, les pouvoirs publiques, les opérateurs économiques et les partenaires au développement afin de construire une vision claire et une matrice d’actions pour valoriser le patrimoine côtier tout en préservant le littoral. Dans une approche long-termiste, un tel exercice devrait se projeter sur les 25 prochaines années.

Anticiper sur l’après-WACA


Le Programme de gestion du littoral ouest africain (WACA), financé par la Banque mondiale sur l’ensemble de la côte régionale et à Sao-Tomé et Principe, est aujourd’hui la réponse la plus remarquable apportée aux défis de préservation et de gestion durable du littoral.


Travaux du WACA à Aného © Klétus Situ, décembre 2022
Travaux du WACA à Aného © Klétus Situ, décembre 2022

Développé en collaboration avec les Etats, l’UEMOA et les populations vivant sur la côte avec un coût total de plus de 220 millions USD, le programme a permis depuis 2018 des avancées significatives dans la préservation des côtes et le renforcement des capacités de résilience des populations. 
Notamment au Togo, avec la réalisation de travaux de protection côtière, le renforcement du cadre juridique et institutionnel de gestion côtière (adoption d’une loi d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral, élaboration d’un schéma directeur, renforcement des mécanismes de contrôle), l’investissement dans des infrastructures socio-économiques au profit des populations locales et des infrastructures touristiques et récréatives pour la mise en valeur des territoires.


Projeté jusqu'en 2026, avec une potentielle reconduction, le WACA a déjà engrangé des résultats significatifs qui méritent d’être consolidés. Anticiper sur l’après-WACA et formuler au niveau national un programme relais, tel que nous le préconisons plus haut, est donc un impératif.

Mettre en valeur le patrimoine écologique, historique et culturel du littoral togolais avec et au profit des communautés


La protection de la côte et des écosystèmes face aux risques que représentent l’érosion côtière, les inondations et la pollution, devrait être associée à la mise en valeur du potentiel touristique et plus largement économique des localités littorales.


Enfants dans une pirogue quittant la rive du Lac Togo © Parmenas Awudza (Avril 2021)
Enfants dans une pirogue quittant la rive du Lac Togo © Parmenas Awudza (Avril 2021)

En effet, avec des projets économiques élaborés et mis en œuvre dans des approches éthiques et écologiques, il est possible de créer un cercle vertueux. A la fois pour la prospérité des populations et la préservation des écosystèmes.


Par exemple, avec l’agriculture maraîchère et la pêche traditionnellement très pratiquées par les populations du littoral, une solution possible est d’accompagner la mise en place de coopératives, qui elles, seraient garantes de pratiques écologiques profitables à la durabilité des ressources et à la pérennité de l’activité. Il s’agirait, pour le cas de la pêche, d’établissement et du respect de quotas et de normes, la création de zones protégées et de brigades communautaires de veille. 


Aussi, le patrimoine écologique (représenté notamment par le bassin du Mono, les lacs, les surfaces de mangroves, les marres aux hippopotames), couplé au patrimoine historique, culturel et cultuel offre au littoral un fort potentiel écotouristique qui mérite d’être exploité. Dans une approche durable et locale, des investissements suffisants et soutenus peuvent faciliter le développement de circuits touristiques novateurs et attractifs. Comprenant à la fois des sites historiques, cultuels et écologiques.


Des villes comme Aného ou Agbodrafo pourraient porter la double casquette de centres culturels et de stations balnéaires pouvant attirer touristes sous-régionaux et afro-descendants. Un développement écotouristique qui sera assurément créateur d’emplois, de recettes et de valeurs pour les communautés et les collectivités locales. 


Une villa à l'architecture afro-brésilienne vielle de 100 ans © Klétus Situ, Aného Décembre 2022
Une villa à l'architecture afro-brésilienne vielle de 100 ans © Klétus Situ, Aného Décembre 2022


En somme, il n’est plus à prouver que les problématiques de protection et de préservation du littoral togolais sont capitales pour l’avenir. Les réponses à y apporter, se doivent donc d’être plurielles et projetées sur le très long-terme. De plus, en intégrant une approche socio-économique durable, elles devront impliquer une diversité d’acteurs, tout particulièrement les communautés à la base qui sont en premières lignes.

Klétus Situ

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